Quand je buvais, toutes mes journées, toute ma vie tournaient autour de l’alcool. Comment en avoir toujours plus, comment ne pas manquer… Comment être tranquille pour boire, comment me créer une occasion socialement acceptable, l’air de rien, ou comment me retrancher pour boire à l’abri des regards.
Quand j’étais dans la dépendance, l’alcool était ma vie, ma vie était l’alcool. J’avais perdu le choix de décider de boire ou non. Et j’avançais comme ça. Je devais boire, alors je buvais. Et c’était comme ça.
Dès la première gorgée, ce soulagement. Le soulagement attendu, anticipé, mérité… le soulagement recherché. Ce soulagement qui à peine obtenu, se transformait alors en course effrénée vers le plus, toujours plus, encore. Juste ne pas s’arrêter, continuer, continuer encore et toujours jusqu’à m’en rendre malade, incapable. Incapable de quoi que ce soit d’autre que de boire. Un puits sans fond que l’on remplit.
Un pantin, une marionnette, une chose, sous le contrôle absolu et total de ce corps que l’alcool avait rendu dépendant, qui ne buvait plus pour être bien mais qui buvait pour ne plus être mal… un pantin qui avait perdu la mesure des choses, le sens de la vie. Une marionnette à la merci de son corps piraté, qui ne vivait que pour abreuver un système… Qui buvait pour vivre et vivait pour boire. Qui rejouait tous les jours inlassablement sa partition, sur une scène de théâtre devenue presque sinistre. Et qui passait à côté du reste… parce que de toute façon, le reste n’avait plus aucun intérêt… Mais plus que ça, qui en fait avait même perdu conscience du reste… jusqu’à son existence…
Aujourd’hui, j’en suis sorti. Et oui, j’en suis fier et soulagé. Les tours de manège sont finis. Cette spirale du toujours plus et du toujours trop peu, je l’ai mise derrière moi… Loin… Et même si après 14 ans hors de l’alcool, la vigilance est toujours de mise, je sais que rien ne me fera remonter dans cette machine infernale. Parce qu’aujourd’hui, la vie est simple, belle, incomparable à ce que je vivais lorsque j’étais ce pantin. Et si un moment je suis tenté, et si les sirènes de l’alcool venaient un jour à me hurler qu’après tout… un petit verre en terrasse… Non non non !
Je l’ai appris à mes dépends et je le sais. Je ne remettrai plus ces fils au bout de mes bras, je ne laisserai pas la place au marionnettiste. Pinocchio c’est fini… tout ça n’est pas ma vie. Parce que je n’ai besoin ni de béquille ni d’artifices…
Et je vis aujourd’hui la vie que je choisis !
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